La pipe et la plume ? La loupe et l’épée…
Vraiment divertissant, ce divertissement renverse donc les rôles, entre Watson & Holmes, s’autorise davantage, puisqu’il associe Pirandello & Stevenson. Si le dissimulé, l’infâme Mister Hyde, représente la part sombre de Londres, piétine, de manière malsaine, le puritanisme hypocrite (pléonasme) de la période victorienne, au-delà matérialise la monstruosité intime, guère magnanime, de l’humanité divisée, l’anonyme Reginald Kincaid en incarne une version douce, se contente d’être un coureur de jupons concon, un buveur obstiné, un joueur endetté. Marionnette peu malhonnête, du « docteur en criminologie », insupporté par son succès, du romancier de ses aventures vécues, très romancées, l’obscur cabot va devoir se réinventer, merci Moriarty, c’est-à-dire devenir le divin (et endeuillé) détective, se transformer fissa en son fameux modèle. Le personnage pourvu d’un auteur, suspendu en hauteur, saura se hisser sur les hauteurs, du courage, du sauvetage, passer à l’action pour de bon, interpréter le rôle de sa vie et d’une vie, sur la (mise en) scène, mise en abyme, d’un théâtre baptisé en hommage à Orphée, dont les canaux aquatiques, in fine incendiés, explosés, paraissent adresser un clin d’œil infernal, à notre fantôme (de l’Opéra) national. Finalement, au terme de la métaphore filée, de fausse gloire, de fausse monnaie, de fausses fifilles au carré, demeure la vérité vraie de l’amitié (masculine) avérée, aimable (même un brin misogyne) moralité, d’un métrage d’un autre âge, pièce rapportée, opusdu passé, dès sa sortie au sein de l’Angleterre vénère de Mistress Thatcher, que cartographièrent, naguère, les (télé)films de Stephen Frears, en direct et in situ, par exemple le diptyque My Beautiful Laundrette (1985) + Sammy et Rosie s’envoient en l’air (1987).
En dépit des excuses in extremis, tongue-in-cheek, du conclusif générique, nulle offense (ni once de cynisme) ici faite à feu Conan Doyle, au cours du parcours constamment drôle, au contraire, car revisiter revient à revaloriser, à laver le regard des avatars, à éviter de rabaisser le totem insulaire, littéraire, au rang de pénible pitre mortifère, ou pire, d’insipide sportif à la sauce US, le British Guy Ritchie s’en chargea, par deux fois, on ne l’en remercie pas (Sherlock Holmes, 2009 + Sherlock Holmes : Jeu d’ombres, 2011). Moins hollywoodien que son confrère Billy Wilder, (re)voyez La Vie privée de Sherlock Holmes (1970) ou (re)lisez-moi, voilà, muni d’un classicisme attentif, précis, rythmé, amusant et amusé, le cinéaste étasunien signe un concentré d’anglicité, bien escorté par une costumière coutumière (de l’évocation des époques, la Judy Moorcroft de Yentl, Barbra Streisand, 1983 et de La Route des Indes, David Lean, 1984), un décorateur de valeur (Brian Ackland-Snow, au boulot à ce poste sur Croix de fer, Sam Peckinpah, 1977 et directeur artistique sur le Draculade John Badham, 1979, le Dark Crystal de Jim Henson, 1982, Le Docteur et les Assassins de Freddie Francis, 1985), un incontournable DP (le local Alan Hume), un compositeur point poseur (Henry Mancini, oh oui). Parodique mais pas dérisoire, pondu par un tandemde spécialistes, produit par la TV (ITC finança aussi des essais de Winner, Cosmatos, Peckinpah, Hyams, Schaffner, Bergman, Donen, Medak, Hamilton, Pakula, Henson ou Jordan), mal reçu par la presse, pourtant primé par les policiers (de Cognac), Without a Clue (Thom Eberhardt, 1988), titre original plus objectif que l’intitulé français réflexif, s’avère, ainsi, une plaisanterie assez réussie, méritant largement son exhumation de saison.
Outre reposer sur un beau duo – Michael Caine & Ben Kingsley, qu’exige le peuple cinéphile ? – et surcadrer, à travers un trou de serrure, Mark Lewis s’en fiche (Le Voyeur, Michael Powell, 1960), les parfaites gambettes de Lysette (Anthony, croisée dans Krull, Peter Yates, 1983, redécouverte dans Dracula, mort et heureux de l’être, Mel Brooks, 1995), cette relecture, sans imposture, sans usure, comporte en sus un casting choral impeccable, implique une troupe de gosses SDF, à la Dickens (& David Lean), dispose d’un hasard (erreur de bonheur), indeedprovidentiel, au sens premier du terme, de psaume (biblique) et de pièce (dramatique). Item méconnu, élémentaire ? Estimable manière, de (re)prendre l’air.
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